C’est la rentrée ! Et je vous propose de discuter… nourriture ! Plus précisément, nourriture du corps et nourriture de l’esprit. Car tout peut être vu comme une nourriture : le soleil jusqu’à la dernière goutte, une conversation, et évidemment, l’étreinte de son enfant. Il y a certainement de bonnes et de mauvaises nourritures. Pour notre brunch-dédicace du 17 septembre (vous pouvez d’ores et déjà jeter un œil dans la rubrique Actualités – Evénements), les gâteaux seront fait maison, avec des amandes et des pommes, et en ce qui concerne les conversations, le hasard des rencontres sera lui aussi de la partie. Le corps et l’esprit, donc, et comme le disait Léonard (Léonard de Vinci, on aurait bien aimé dire notre ami Léonard), comme le disait Léonard, l’esprit dans un geste, la réflexion dans la peinture. Mens sana in corpore sano. On aimerait tous dire, comme Voltaire, « en somme, Messieurs, je meurs guéri ». Je meurs guéri, et bien sûr je vis guéri, car il y a une vie avant la mort (c’est ce que soulignait Edouard Baer lors de la crise du Covid). Alors vivons guéri. Mais que faut-il faire lorsque l’on tombe malade, s’interroge Argan dans Le Malade Imaginaire ? Vous connaissez peut-être la réponse du sage Béralde, son frère : rien. Rien, parce que parfois c’est ton effort qui crée l’obstacle (on retrouve cette pensée chez Maine de Biran). Rien, parce que le corps a ses mystères, ses secrets et ses pouvoirs, ses trésors infinis de régénération, et quand on lui fait confiance, sa grande raison sait nous montrer qu’il est le premier médecin. Mens sana in corpore sano, le Saint Graal ? Tous ne l’ont pas réalisé. Prenez l’exemple de Judas : dans toute l’histoire de la peinture, vous ne trouverez jamais son visage avant La Cène de Léonard, qui fut d’ailleurs bien embarrassé lorsqu’il fut question de représenter cet esprit malsain, auquel personne n’avait voulu offrir de traits. Léonard fut pressé par le prieur de finir sa toile dans les temps. Il argumenta en expliquant qu’il était très difficile de représenter Judas, que l’inspiration lui manquait. Le prieur se montra fort désagréable, et Léonard de lui rétorquer qu’il allait certainement finir par offrir à Judas ses traits. Un esprit dans un geste, des intentions sur un visage. Voilà l’idée que Léonard se faisait de la peinture. Il n’était pas un fils légitime, et c’est cela qui lui barra la route pour embrasser une carrière de notaire. Ça nous arrange bien finalement ! Peut-être que cette carrière ne lui était pas taillée comme un gant.
Sans transition : c’est la rentrée, et quoi de mieux pour la rentrée que de rappeler que la peur peut être dangereuse. Les surfeurs le savent bien, et tous les gens qui glissent, qui se tiennent dans les plis et les recoins du monde, dans le berceau de la nature. Alors cette semaine, je vous propose de glisser, de surfer, au dessus de vos peurs, d’être aussi légers que vos plus grands pouvoirs de dissolution de la pesanteur. Car la légèreté, ce n’est pas l’inconsistance et l’esprit échevelé, c’est un pouvoir de rendre léger. Que la plume soit votre source d’inspiration. La plume des plumages, et non celle d’une « fantasme escrime » baudelairienne.
Mais nous, de quoi nous inspirons-nous ? De la vie ! Du temps qui passe, du temps qui s’écoule, goutte à goutte, du temps qui file ses mystères, et parfois nous aimerions bien dire, comme Blaise (notre chat s’appelle Blaise, mais rien à voir avec Blaise Cendrars), nous aimerions bien dire, mi-Braises mi-Cendres, que nous trempons notre plume, pure simplicité, dans ce grand encrier qu’est la vie, ce chaotique magma flamboyant, qui nous offre parfois le spectacle d’accoucher d’étoiles qui dansent (je ne peux résister au plaisir de vous livrer, intacte, la formule de Nietzsche : « Il faut porter en soi un chaos pour accoucher d’une étoile qui danse ».
Pour finir, voici le moment tant attendu de la réponse à notre petit jeu olfactif de la semaine dernière : il s’agissait d’Angélique Noire, de Guerlain. Si vous pouvez, courez le respirer, c’est un chef-d’œuvre. Nous vous souhaitons une semaine aussi légère que l’air, aussi libre que l’art ! A lundi prochain.